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Nous partons de l'oubli, qu'il faut prendre en compte clairement.
L'oubli voulu, organisé depuis 1848 par le gouvernement français avec ses complices: l'administration coloniale, le clergé enseignant, les colons, la presse
réactionnaire.
Ajoutons l'oubli dérivant du silence, des paroles comprimées, des bouches muettes, des souvenirs atroces qui remontent à la gorge la nuit et que l'on rejette au petit matin, avec la venue du soleil... des souvenirs obsédants, associés aux bruits insolites: le tintement d'une sonnette ou d'une cloche, le claquement du fouet d'un cocher impatient, les vociférations des militaires en manoeuvre...
L'oubli imposé comme mot d'ordre dans une campagne électorale, qui vous prend aux tripes et ne vous lâche plus.

L'oubli à tous les coins de rue, debout, bras croisés, qui vous attend, vous inspectant des pieds à la tête, vous surveillant la mémoire, contrôlant votre cerveau.
L'oubli qui se faufile au premier rang des spectateurs qui vous toisent, moqueurs, dès que vous sortez de la plantation et que vous cherchez quelque part où courir, où vivre, où mourir... loin des lieux du supplice, loin des lieux de torture...

L'oubli invisible, armé d'une hache qui tranche les liens, un à un, qui vous retiennent à un Passé qui vous colle à la peau.
L'oubli qui vous rue à petit feu
et qui vous transforme en zombi...


ORUNO D. LARA, extrait de De l'oubli à l'histoire. Espaces et identités caraïbes, 1998.

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