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14 juillet 2018 6 14 /07 /juillet /2018 15:46

QUI  A  RÉTABLI  L’ESCLAVAGE  EN  GUADELOUPE  EN  1802 ?

BONAPARTE  LE  PREMIER  CONSUL

 

par ORUNO D. LARA

CERCAM (CENTRE DE RECHERCHES CARAÏBES-AMÉRIQUES) 

4 juillet 2018

 

 

Ainsi, refusant l’artifice, la confusion, les contorsions et les effets de manche, soucieux comme toujours de penser historiquement, une seule question me semble-t-il se pose :

 

QUI A RÉTABLI L’ESCLAVAGE EN GUADELOUPE EN 1802 ?

 

Après démonstration, se fondant sur un raisonnement logique mettant en ligne des textes, des écrits provenant des archives, cette question n’a qu’une seule réponse : BONAPARTE le Premier consul.

 

Commençons, au préalable, par évoquer une autre question - qu’on me permette cette digression - et tâchons d’y répondre :

SCHŒLCHER a-t-il aboli l’esclavage ?

 

À combien de colonisés originaires de Guadeloupe et de Martinique, a-t-on fait croire depuis des lustres, que Victor SCHŒLCHER serait l’être semi divin qui, originaire d’Alsace, aurait aboli l’esclavage dans les colonies françaises ? Il suffit de dresser la liste des statues, des tableaux, des illustrations et des gravures montrant l’apôtre de l’émancipation entouré de ses nègres affranchis, de comptabiliser tous les politiciens de talent – de droite comme de gauche ou du centre - qui ont obtenu les suffrages du scrutin universel (masculin puis mixte à partir de 1944) en se dotant pour tout programme d’une association quasi mystique avec le « grand abolitionniste ». Or il n’en est rien. Une réponse à la question se formule de cette manière, historiquement.

Les onze membres du gouvernement provisoire ont élaboré le 25 février 1848, sous la direction de LAMARTINE, LEDRU-ROLLIN et Louis BLANC, un projet de décret d’émancipation des esclaves qui n’a pas été porté et publié par Le Moniteur.

ARAGO, ministre de la Marine et des Colonies, choisit le 3 mars Victor SCHŒLCHER « avec le titre de sous-secrétaire d’État pour m’aider dans la grande œuvre de l’Abolition et de composer une commission (dont il aurait la présidence) chargée de rédiger tous les règlements que le régime de liberté rendrait indispensables ». ARAGO, le lendemain, obtient de ses collègues du gouvernement provisoire - à la fameuse séance au cours de laquelle est discuté et adopté le décret relatif aux élections de l’Assemblée nationale constituante – la signature du décret du 4 mars paru au Moniteur le 5 mai : « le gouvernement provisoire de la République considérant que nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves, décrète :… ».

  À la séance du 23 avril 1848, « Le ministre de la Marine présente un projet de décret sur l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises. Ce projet est adopté avec quelques modifications de rédaction que le ministre est chargé de faire ».

Les onze membres du gouvernement provisoire ont par la suite adopté les décrets d’émancipation (une douzaine) à la séance du jeudi  27 avril 1848. Ces décrets ont été publiés par Le Moniteur, 2 mai et 3 mai 1848, en chargeant le ministre de la Marine et des Colonies (ARAGO) – et le ministre de la Guerre en ce qui le concerne pour le second décret - de l’exécution de ces décrets.

Que répondre donc, finalement, à la question initiale : SCHŒLCHER a-t-il aboli l’esclavage ? On s’aperçoit que la question est mal posée au départ. Elle se pose à ceux qui – encore nombreux - auraient voulu que ce soit encore vrai, que SCHŒLCHER puisse avoir bien aboli l’esclavage. Qui a aboli l’esclavage aux colonies en 1848 ?

Le « gouvernement provisoire de la République » comme il se nomme lui-même en 1848.

(O.D. LARA, LA LIBERTÉ ASSASSINÉE, Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion en 1846-1856, 2005).

 

Passons au cas de RICHEPANCE.

Se demander si c’est lui, RICHEPANCE, qui a rétabli l’esclavage, c’est encore poser une question qui conduit à débattre dans un « pitt à coqs », à s’empêtrer dans de stériles discussions… à s’éloigner du véritable champ de l’HISTOIRE !

Reposons la question en nous plaçant sous la couverture de l’Histoire.

 

Le coup d’État du « 18 brumaire » an VIII (9 novembre 1799) s’accompagna du vote de la Constitution du 22 frimaire an VIII (13 décembre 1799), promulguée et mise en application le 4 nivôse (25 décembre), et approuvée par un plébiscite dont les résultats furent proclamés le 18 pluviôse (7 février 1800). Cette Constitution de l’an VIII - qui resta en vigueur jusqu’en avril 1814 - octroyait à BONAPARTE seul, nommé Premier consul, assisté de deux consuls aux pouvoirs réduits (CAMBACÉRÈS et LEBRUN), la charge du « gouvernement ». Le Consulat qui dura quatre ans six mois et demi, s’acheva le 18 mai 1804 avec la proclamation de l’Empire.

L’article 91 de la Constitution de l’an VIII stipulait que le régime des colonies serait « déterminé par des lois spéciales ».

 

Dès sa prise du pouvoir, le 21 brumaire an VIII (12 novembre 1799), constatant que « les caisses de l’État sont exactement vides »[1], poussé par les milieux d’affaires ayant soutenu Brumaire (banquiers, industriels, fournisseurs aux armées...), pressés de reprendre leurs activités mercantiles, entouré de conseillers esclavagistes notoires, BONAPARTE afficha sa détermination : il voulait rétablir l’esclavage dans les colonies. Le chef de l’Exécutif pensait se débarrasser du décret du 16 pluviôse an II et revenir à l’ancien régime colonial, comme le lui suggéraient ces conseillers qui pressaient dans ce sens : FORFAIT son ministre de la Marine et des Colonies, les amiraux GANTEAUME et VILLARET-JOYEUSE, le royaliste VAUBLANC et l’ancien intendant colonial BARBÉ-MARBOIS, les conseillers d’État  LESCALLIER et le « Martiniquais » MOREAU de SAINT-MÉRY.

En revanche les conseillers antiesclavagistes comme l’amiral TRUGUET, le sénateur VOLNEY, GINGUENÉ entré au Tribunat, et GRÉGOIRE, n’étaient guère écoutés.

Pourquoi la décision de supprimer le décret de pluviôse n’a-t-elle pas été prise ?

Le personnage visionnaire et militaire qui s’installa aux commandes de l’État ne pouvait plus manœuvrer à son aise comme sur un champ de bataille. C’est ce que lui murmura Jean Jacques Régis CAMBACÉRÈS – le second consul, ministre de la Justice, né en 1753, avec lequel BONAPARTE s’entendit à merveille -, qui lui conseilla la prudence et la patience. Se méfiant d’une opinion jugée hésitante, il prônait une stratégie de contournement du décret de pluviôse qui emporta l’adhésion de BONAPARTE. Immédiatement, dès le début de leurs relations, BONAPARTE confia à CAMBACÉRÈS le soin de résoudre ce problème. 

Les historiens qui ignorent le rôle joué par le second consul dans cette affaire, soit ne comprenant pas le comportement de BONAPARTE, émettent des suggestions diverses, soit le trouvent « ambigü » - expression de Thierry LENTZ -, soit s’imaginent qu’il se désintéressait de la question. Rien de plus faux ! C’est une question fondamentale pour BONAPARTE qui voulait profiter de la paix qui se profilait pour lancer la machine des affaires à pleine vitesse dans le monde des colonies où il pensait que tant de richesses accumulées l’attendaient.

CAMBACÉRÈS s’entoura de certains de ses anciens collègues de la Convention dont il obtint le concours en les casant dans l’administration et se mit au travail. Un projet de loi pour les Colonies concernant l’esclavage et la traite négrière signé par GRANET - ex législateur et rédacteur du 1er article du décret du 16 pluviôse, chef de bureau des Colonies -, est présenté à BONAPARTE à Paris le 12 nivôse an VIII (2 janvier 1800). Soulignant en exergue que « la nécessité et l’urgence de cette loi ont été reconnues dans une conférence préliminaire avec le Consul CAMBACÉRÈS, alors ministre de la Justice », l’auteur, un ancien conventionnel, développe en quatre articles - chacun de ces articles accompagné de son motif - qu’il faut lire attentivement pour apprécier l’art et la manière de contourner les obstacles juridiques. Bref, ce projet de loi prétend neutraliser le décret du 16 pluviôse an II, rétablissant ainsi l’esclavage sans toutefois le proclamer explicitement, nécessitant une dose de « secret » pour ne pas alerter l’opinion publique surtout préoccupée de jouir de la paix. Dans la pratique, les affaires pouvaient reprendre avec les colonies sans se soucier du barrage de pluviôse (février 1794). Ce projet apparaît comme étant la solution au problème réclamée par BONAPARTE au second consul.

Ce grand écart s’effectue sans qu’on se doute que c’est CAMBACÉRÈS qui mène la danse. Au vrai ces « débats en coulisse » entrevus par certains auteurs se déroulent sous les auspices du « maître d’œuvre de Napoléon » comme le suggèrent des travaux biographiques publiés en 2001.

CAMBACÉRÈS jusqu’au 1er octobre 1801[2], souffla au Premier consul d’adopter un comportement circonspect. Par la suite, la paix revenue, une nouvelle conjoncture internationale ouvrit des possibilités hasardeuses. Bien sûr, comme on le connaît, BONAPARTE ne pouvait pas s’empêcher de ruer, et de se lancer, imprudemment, dans plusieurs aventures maritimes, une fois qu’il n’avait plus rien à pourfendre sur terre. Avant de les énumérer, ajoutons une pièce au dossier.

Le dossier sur l’esclavage en Guadeloupe – et à Saint-Domingue - ne se laisse pas en effet circonscrire sans qu’on y ajoute la Louisiane et les Florides. Rétrocédée à la France par le traité de San Ildefonso le 1er octobre 1800, la Louisiane devient le centre d’un empire américain rêvé par BONAPARTE. BERTHIER, ministre à la Guerre, dépêché à Madrid, ne parvient pas à convaincre les Espagnols de céder également les Florides occidentales et orientales (Voir O.D. LARA, Caraïbes entre Liberté et Indépendance, Réflexions critiques autour d’un Bicentenaire 1802-2002, 2002).

Ce rêve américain supposait la reconquête des îles (Guadeloupe et Saint-Domingue) et le rétablissement du système esclavagiste, y compris en Guyane française.

Les préliminaires de paix signés à Londres par OTTO et HAWKESBURY le 1er octobre 1801 – la paix d’Amiens signée le 25 mars 1802 - l’accord mettant fin à la quasi-guerre entre la France et les États-Unis signé à Mortefontaine le 30 septembre 1800, ouvraient une trêve avec l’Angleterre qui dura jusqu’au 13 mai 1803. Une pause de 19 mois et 10 jours que le Premier consul voulait accommoder à son profit.   

 

Contrairement aux recommandations de l’amiral TRUGUET préconisant prudence et modération, le Premier consul ordonna plusieurs expéditions : en décembre 1801 vers Saint-Domingue, le 5 avril 1802 vers la Guadeloupe, vers la Martinique avec VILLARET-JOYEUSE nommé le 3 avril capitaine général de l’île entré en fonctions le 14 septembre 1802, vers La Nouvelle Orléans (hommes et navires rassemblés à Helvët Sluys en Hollande, jusqu’au 30 mai 1803 et qui ne prendra jamais la mer !). Une cinquième expédition pour les mers du Sud… Voire une sixième… BONAPARTE se projetait par la pensée aux Amériques, en Asie, au Pacifique… Entêtement et infatuation !

Le contre-amiral DECRÈS remplaça FORFAIT le 3 octobre 1801 comme ministre de la Marine et des Colonies (Arrêté du 11 vendémiaire an X – 3 octobre 1801). Ministre courtisan ayant son franc-parler, il servit son maître jusqu’aux Cent-jours, au moment où prenant la pose, NAPOLÉON décida de supprimer d’un trait de plume, la traite négrière ! 

 

La confiance de BONAPARTE en son collègue et ministre de la Justice persista comme on peut s’en rendre compte en examinant ce dossier :

BONAPARTE envoya le 7 floréal an X (27 avril 1802) à CAMBACÉRÈS « un projet d’arrêté à convertir en sénatus-consulte :

1° Un pour l’île de France (île Maurice) ;

2° Un pour Tobago, la Martinique et Sainte-Lucie ;

3° Un pour la Guadeloupe ;

4° Un pour Saint-Domingue ;

Enfin, un cinquième pour défendre l’arrivée des Noirs sur le continent de la République, et remettre en vigueur les règlements qui existeraient sur cet objet.*

Je vous prie de rédiger ces cinq projets, et d’en conférer avec les citoyens REGNIER, DUPUY et RŒDERER, afin qu’après-demain ces projets se trouvent arrêtés ».

* « L’arrêté du 29 mai interdira Paris et le littoral aux officiers noirs, celui du 25 juin interdira l’entrée des Noirs en France. L’esclavage et la traite seront rétablis par une loi du 20 mai 1802. Cette importante lettre et ses annexes préparent cette décision ».

 

La loi du 30 floréal an X (20 mai 1802) - derrière laquelle on devine la main de CAMBACÉRÈS – adoptée le jour même de la promulgation du traité de paix avec l’Angleterre, se garda bien d’abroger la loi du 16 pluviôse an II et de rétablir l’esclavage. La loi sembla se borner à maintenir l’esclavage, là où il n’avait jamais été aboli, mais une lecture attentive de l’exposé des motifs, rédigé par DECRÈS, révèle : « Je conçois qu’il serait désirable que la loi que je propose fût plus généralisée ; mais moyennant un système suivi, son résultat pourra s’étendre sans commotion et sans résistance dans toutes nos colonies dans un court espace de temps ; et, le fait établi, il sera plus facile alors qu’aujourd’hui d’en consacrer le principe…(…) La traite doit être rétablie, une loi l’a détruite, le moment de l’émission d’une loi contraire n’est pas venu ; en attendant qu’elle soit émise, la traite doit être tolérée et même protégée dans les colonies intactes ».

Ce rapport de DECRÈS du 1er floréal an X (21 avril 1802) ne se dissocie pas du dossier en cours sur la table de travail du second consul. C’est toujours lui qui orchestre la musique du bal des hypocrites.

Ce texte du 30 floréal apparaît alors comme « un rideau de fumée destiné à cacher un proche rétablissement général de l’esclavage, dans toutes les colonies » observent deux historiens, Pierre BRANDA et Thierry LENTZ qui tirent de ce dossier « un bilan qui n’a que faire des bons sentiments (sinon ils ne seraient pas historiens !) ».  

 

Le Premier consul s’adressa à DECRÈS en ces termes pour qu’il puisse transmettre ses ordres à RICHEPANCE :

 

« AU CONTRE-AMIRAL DECRÈS, MINISTRE DE LA MARINE ET DES COLONIES

Malmaison, 24 messidor an X (13 juillet 1802)

Le général RICHEPANCE, citoyen ministre, a gardé à la Guadeloupe le bataillon expéditionnaire que vous avez envoyé l’ordre de faire passer à Saint-Domingue. Je désire que ce bataillon soit complété à 1000 hommes et organisé en bataillon colonial de la Guadeloupe. Donnez ordre qu’on fasse partir, le plus promptement possible, pour la Guadeloupe, 600 hommes de troupe de la marine, pour le compléter. Moyennant cette disposition, tout ce qui a été ordonné pour la Martinique continuera d’avoir lieu, hormis que le détachement de la 82e, embarqué sur l’escadre du contre-amiral VILLENEUVE et destiné pour la Martinique, débarquera à la Guadeloupe, et que le bataillon de la 49e, qui s’embarque au Havre, au lieu de se rendre à Saint-Domingue, se rendra à la Martinique.

Par ce moyen, le général RICHEPANCE se trouvera avoir à la Guadeloupe deux bataillons de la 66e, un bataillon colonial de la Guadeloupe et un bataillon de la 82e.

Le général VILLARET (VILLARET-JOYEUSE) se trouvera avoir à la Martinique un bataillon de la 37e, composé de ce qu’il embarque à Brest et du détachement de ce corps qu’il prendra à la Guadeloupe, et un bataillon de la 49e.

Il y aura à Tobago un bataillon de la 15e de ligne.

En ajoutant à ces dispositions la recommandation au général VILLENEUVE de mettre la plus grande activité à faire passer d’une colonie à l’autre des secours de troupes, selon qu’il deviendra nécessaire, on aura lieu d’être parfaitement tranquille, et nous serons à même de prendre toutes les mesures que nous jugerons à propos pour les colonies. La première de toutes paraîtrait d’établir l’esclavage à la Guadeloupe comme il l’était à la Martinique, en ayant soin de garder le plus grand secret sur cette mesure, et en laissant au général RICHEPANCE le choix du moment pour la publier » (Minute, Archives nationales, AF IV 863, messidor an X, n° 27).

 

Les ordres de BONAPARTE paraissent très clairs : le Premier consul a décidé de permettre à RICHEPANCE de rétablir l’esclavage en Guadeloupe, au moment qu’il jugera le plus opportun. La décision vient du chef de l’Exécutif et de lui seul, BONAPARTE.

 

Ce sont sans aucun doute des instructions de DECRÈS relayant les recommandations et les précautions sémantiques de CAMBACÉRÈS qui éclairent l’arrêté pris par RICHEPANCE le 28 messidor an X (17 juillet 1802), car comment expliquer autrement sa décision et sa manière de la libeller ? Curieux qu’on ne puisse pas lire le terme « esclavage », ou qu’il soit question d’un « régime domestique et paternel » et soulignant que « jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné, le titre de citoyen français ne (serait) porté que par des Blancs ». Les ménagements de style, les précautions de vocabulaire qu’affectionnait tant le second consul, transmis à BONAPARTE et à son ministre DECRÈS, se retrouvent dans ce qui a du être les consignes, les directives données à RICHEPANCE avant son départ ou reçues après son appareillage de France, le 5 avril 1802. Le texte de son arrêté provenait donc en droiture de Paris, du bureau du ministère de la Marine et des Colonies, puissamment lié au cabinet de travail de CAMBACÉRÈS, le second consul, le conseiller confidentiel de BONAPARTE. Il ne peut en être autrement.   

Immédiatement après la loi du 30 floréal, l’esclavage rétabli en Guadeloupe en juillet, puis en Guyane, ce sont toutes les colonies françaises – sauf Saint-Domingue où la guerre en 1802 ne fait que commencer - qui reviennent sous la coupe du système esclavagiste et de la traite négrière qui constituent pour BONAPARTE et ses comparses, le fondement d’une richesse potentielle à accaparer, à amasser.

BONAPARTE voulait également rétablir l’esclavage en Guyane, colonie française, où Jean-Baptiste-Victor HUGUES avait été dépêché et où il était entré en fonctions à Cayenne le 6 janvier 1800. Il deviendra plus tard en 1804, commissaire de l’Empereur.

Le chef de l’exécutif s’adressa à son ministre pour lui ordonner :

 

« AU CONTRE-AMIRAL DECRÈS, MINISTRE DE LA MARINE ET DES COLONIES

Paris, 19 thermidor an X (7 août 1802)

Les instructions pour Cayenne me paraissent bonnes ; j’en approuve l’esprit et le sens. Mais les instructions secrètes doivent être remises au net. Il est de principe qu’avec une espèce d’hommes qui ont été d’une opinion différente de celle qu’on leur prescrit, il ne faut jamais discuter ; cela ne fait que les aigrir, parce que cela renouvelle les discussions qu’ils ont eues sur cet objet. Il faut dire, en deux mots, que, Cayenne étant destiné à de grands résultats, un grand nombre de Noirs doit y être envoyé, et tout préparer au rétablissement de l’esclavage. Ce principe est non seulement celui de la métropole, mais encore celui de l’Angleterre et des autres puissances européennes. Un homme destiné à passer sa vie dans les colonies doit sentir que, si les Noirs ont pu se maintenir dans les colonies contre les Anglais, ils tourneraient leur rage contre nous, égorgeraient les Blancs, menaceraient sans cesse d’incendier nos propriétés, et ne présenteraient aucune garantie au commerce, qui n’offrirait plus de capitaux et resterait sans confiance » (Minute, Archives nationales, AF IV 863, thermidor an X, n° 27).

 

Les ordres du rétablissement de l’esclavage parviendront à Cayenne, gouvernée par Victor HUGUES, en novembre 1802. La situation ne changea guère puisque HUGUES a toujours veillé à maintenir dans la colonie, le travail forcé des esclaves.

 

Antoine RICHEPANCE en Guadeloupe, en juillet, Victor HUGUES en Guyane, en novembre 1802, ont obéi aux ordres du Premier consul : BONAPARTE ayant pris sa décision de rétablir l’esclavage, les autorisa à organiser son rétablissement en 1802 dans ces deux colonies.

 

En conclusion, BONAPARTE ordonna à RICHEPANCE d’exécuter ses ordres, après la reconquête de la colonie. Le rétablissement de l’esclavage à la Guadeloupe en 1802 est une décision qui vient de Paris, de l’Exécutif. RICHEPANCE et Victor HUGUES ont été tous les deux des exécutants qui obéirent aux ordres de BONAPARTE le Premier consul.

 

Après avoir perdu du temps à remettre les pendules à l’heure, on peut insister, amèrement, sur la difficulté, le temps passé en Guadeloupe - et en Martinique d’ailleurs -,  à combattre la bêtise, la fainéantise, le mensonge, la suffisance, bref l’enflure dans toutes ses dimensions insulaires !

Est-ce si difficile de débattre en accordant logique et simplicité, en y ajoutant un zeste de rigueur, de droiture voire d’élégance ? Bref, en s’efforçant d’arborer à la boutonnière un brin de culture en somme !

Au lieu de se contenter de pavaner, de pérorer, de s’afficher sous les sunlights, de quémander des applaudissements, de se rappeler aux bonnes grâces de ses maîtres, tout en se vautrant dans le cloaque de la colonisation et dans la vase de l’assimilation …

 

ORUNO D. LARA

CERCAM

4 juillet 2018

 

 

[1] Cf. GAUDIN appelé par BONAPARTE à restaurer les finances du pays, dans son Compte des Finances pour l’An VIII.

[2] Date des préliminaires de paix signés à Londres et du changement de ministre de la Marine et des Colonies.

 

 

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